Imperturbable, calmement posé sur mon lit, je contemple le bureau qui se dresse non loin de la porte, seul ameublement de travail dans cette pièce. Au dessus se trouve un livre, orné de cuir et d’une grande qualité, je reste pensif à sa vue. On me l’a remit le jour de mon arrivée, me conseillant de le tenir à jour et d’en prendre grand soin. Mais à qui le disait-il ? Je suis quelqu’un de très consciencieux avec les livres et surtout lorsqu’il s’agit de mon propre livre. Mais à quoi bon écrire ? J’ai déjà mon journal personnel ou j’annote ce dont j’ai besoin … Et pourtant, malgré moi, une terrible envie d’écrire tord mes entrailles, lacère mes tripes et brûle mon âme telle la fournaise de l’enfer. Succombant à ce doux péché, je me levai silencieusement pour me rendre au bureau. Posant un doigt sur la couverture, je sentis le contact du cuir froid, le laissant se promener ainsi jusqu'au rebord du livre que j’ouvris ensuite. M’asseyant, je pris le stylo qui se trouvait déjà à coté, annonciateur depuis longtemps de ma résolution à tâcher les pages vierges de ce manuscrit.
Je profane encore une fois de ce sang noir les pages immaculées de ce journal, transcrivant la réalité du quotidien dans ce recueil de mémoire, qui servira un jour de vestige de mon être, tel un vieux monument oublié par le temps. Cela ne fait que quelques jours que je suis arrivé et c’était comme je me l’attendais, la surprise et l’émerveillement furent bien vite remplacés par la banalité du présent et je continue maintenant simplement à vivre pour finir les études, études que tu aurais aimé faire, à ne point en douter …
La suite ne raconte que des faits banals du quotidien, des heures de cours interminables et des brèves rencontres entre élèves. Quelques pages sont donc ainsi écrites de cette façon, sauf quelques unes qui retiendront sans doute l’attention d’un opportun fouineur si quelqu’un venait à fouiller dans ses affaires. Car certaines pages comportent un étrange symbole en haut de la page et l’écriture est plus soignée que d’ordinaire.