Journée de ménage [Pv Lestat]

Le jour était encore jeune et déjà Elrisa avait plusieurs corvées à faire. Une aussi grande maison ne laissa pas de repos aux employés travaillant à son entretien. Dépoussiérer de vieille statue, s’assurer que les couloirs étaient bien propres, etc. À l’heure de midi, elle eut droit à une courte pause pour lui permettre de manger. Peu de temps après avoir fini de se ravitailler, elle se dirigea vers le salon privé des Bathory. Arrivée devant la porte du salon, la jeune domestique se figea, brusquement indécise. On lui avait bien spécifié que les Bathory n’aimaient pas que des intrus y entrent sans leurs permissions. Cependant, elle ne pouvait se permettre de ne pas faire cette tâche. Qui savait quelle conséquence cette insubordination pourrait entraîner sur elle et sa carrière? Se mordillant nerveusement la lèvre inférieure, Risa imaginait différant scénario qui pourrait arriver. Puis, secouant la tête pour chasser ces pensées négatives et déterminées, ouvrit la porte du salon avant d’y entrer immédiatement après, de peur de perdre son courage à nouveau.

La jeune infant se figea devant la beauté et le luxe de la pièce. Pendant près de cinq minutes, elle resta muette devant une telle beauté, un tel luxe. Soudain, le souvenir de la misère de son enfance revient la frapper avec une violence qu’elle n’avait jamais connue. Se refusant à sombrer dans la nostalgie, Elrisa se décida à se mettre le plus rapidement possible au travail. Le travail allait l’aider à oublier ses vieux souvenirs. Elle promena un regard de plus en plus apitoyé devant l’état du salon. C’était à croire que plus personne n’y avait fait le ménage depuis plusieurs années. Un soupire lui échappa, puis elle s’attaqua au ménage. Il y avait beaucoup à faire dans la pièce, dépoussiérer, ranger les objets qui trainaient, s’assurer que les rideaux n’étaient pas élimés et bien tirés, ainsi que s’assurer qu’ils n’avaient pas besoin d’être nettoyés.

Ne se laissant pas abattre par l’ampleur de la tâche qu’elle avait à accomplir. Elle sortit son plumeau et commença aussitôt à enlever la poussière des meubles, elle avait assez perdu de temps comme cela. Une chance la poussière n’était pas son pire ennemi, une fois les meubles à nouveau propres, elle s’attaqua au plancher. Son désir d’échapper à ses démons du passé fit qu’elle travailla avec plus d’ardeur et aussi plus rapidement. Voyant que quelques objets avaient été déplacés, Risa les remit à leurs places habituelles, enfin, d’après les dires des autres domestiques. Bien qu’elle était la dernière arrivée en temps que domestique, la jeune soviétique ne c’était encore jamais retrouvé en charge du ménage du salon privé des Bathory. Le fait que c’était la première fois qu’elle s’occupait de cette pièce la rendait extrêmement nerveuse et craintive de commettre une erreur quelconque qui lui retomberait dessus.

Une fois la pièce dépoussiérée et rangée, la jeune domestique promena un regard satisfait sur la pièce. Étant donné l’ampleur de la tâche, elle était satisfaite d’avoir tout accompli, ou presque, en aussi peu de temps. Maintenant, il ne lui restait plus qu’à s’occuper des rideaux. Posant un regard sur les rideaux, elle crut remarquer dans la pénombre de la pièce une tâche au sommet de l’un d’entre eux. Aussitôt elle s’approcha pour observer cela de plus près, malheureusement la tâche était trop haute pour elle. Elle sortit de la pièce pendant quelques instants, le temps d’aller chercher un escabeau. De retour dans le salon, Elrisa déposa sur la petite échelle et grimpa dessus pour observer la tâche. Comme elle le craignait, c’était bel et bien une tâche. Elle allait devoir apporter les rideaux en bas dans la laverie, les mettre à laver, puis aller chercher de nouveau rideau pour remplacer ceux manquants. Un nouveau soupir lui échappa, grimpant un nouvel échelon de l’escabeau, la jeune femme parvient à décrocher le rideau tâché. Elle commençait à le plier pour pouvoir le descendre plus facilement, lorsqu’elle entendit un bruit derrière elle qui lui glaça le sang et elle se raidit d’appréhension.

Une journée de plus dans ce capharnaüm fantasmagorique, une de plus à usurper l’identité du plus commun des mortels en partie alité sur le trône de velours de son bureau. La kyrielle de leur folie se construisait au fur et à mesure, prenant parfois des sinuosités incongrues, empruntant par d’autres fois le plus monotone des sentiers. Il avait ainsi admiré la déchéance de l’astre de sorgue parmi les nitescences célestes jusqu’à ce que les premiers rayons de l’aube ne le rabaissent à sa sinistre nature d’ogre sanglant. Une nuit mouvementée, sous le règne d’une appétence sans mesure aucune et une volonté de déverser une retenue trop emphatique exposée à longueur de temps face à ces humains pestilentiels. Une cruauté infuse qui avait en cette douce soirée d’accalmie surpassé l’être flegmatique qu’il était, et avait condamné le mythe familial à se répéter. Tel le plus dextre des félidés et le plus discret des traqueurs, sa galbe dansait d’une pénombre à l’autre à l’instar d’une succincte bourrasque de vent froid. Le binôme de chrysolites qui lui servait de trésor oculaire scrutait avec sollicitude les mets en errance… Imprudents partisans du cartésisme, leur impudente rationalité deviendrait l’écueil de leur survie mais ferait au moins le divertissement de ceux qui iraient s’y heurter. De quelle hémoglobine allait-il donc se rassasier… Celle d’un arôme âcre et puissant… Celle d’une saveur suave et ensorcelante… Si l’entracte ne concernait encore qu’une volonté de se nourrir, mais il y avait l’indomptable désir de retrouver cette volupté de dominance, d’omettre toute trace de civilité pour s’adonner à la réalisation de quelques géhennes inavouables. Curieusement, ce ne fut aucun des trois premiers martyrs devenus macchabées une fois un taux de dipsomanie assouvie qui fut la cible de sa véritable vésanie. Quidam ou nymphe, le choix était indécis, certes délices culinaires, mais pas suffisamment rassasiant pour un incube aux aptitudes de sustentation aussi chimériques que sa notoriété. Solitaire dans sa chasse, le démon devenu animal permit à sa dépravation de s’exprimer dans toute l’atrocité de son art à travers multiples aboutissements tout aussi ludiques que lubriques. Jusqu’à ce que la fragrance escomptée ne parvienne à ses capteurs olfactifs, et qu’il ne déclare avoir déniché la Juliette de sa tragédie nocturne.

Charmante sylphide aux boucles de cuivre et aux prunelles de miel, son parfum était tout aussi tiré de ce nectar, sucré au plus enivrant des saccharoses, il était convaincu que les flots ardents qui l’animaient seraient d’une jouissance propre à le conforter dans son phallocentrisme. Engrené par la bestialité de ses précédents délassements, ce ne fut pas le plus subtil des contes que l’on pourrait relater pour la rencontre du chasseur à sa proie, ou celle d’une innocente à sa perte. Les tribulations d’une âme à la fertilité du plus vil des chirurgiens avide d’une nouvelle exploration anatomique dont la satisfaction ne serait de loin pas réciproque. Quelque part camouflé dans les corridors méconnus des nombreux hôtes de l’immense demeure, se jouait le plus sordide rituel d’ablution que les ouvrages aient su narrer de leurs pages surannées. Des livres de chair superflues furent délivrer entre maintes vociférations et sanglots, entre quelques susurres de patenôtre désenchantée. Un sadisme incrusté dans chaque parcelle de peau lacérée et perle lacrymale déversée… Récolté dans chaque goutte de fluide prélevée et dont le flot serait l’affusion luciférienne d’une entité aux deux millénaires passés. Bien qu’investigateur de ces ineffables immondices, Lestat n’était au petit matin que la parfaite illustration que tout le monde lui connaissait, celle d’un homme placide, indifférent en bon nombre de circonstances. Fort heureusement, ses obligations professionnelles ne l’appelaient pas pour ce début de jour pourtant ordinaire. Calfeutré dans son antre, il ne pouvait entendre les beuglements des étudiants et profitait d’un calme qui lui rappelait l’époque où ce château n’abritait encore que les membres de son illustre famille, celle où il ne se sentait pas totalement dépossédé de son chez lui en dépit de son éternel détachement. Dans le noir le plus complet, le directeur se laissait aller à la négligence, sa crinière d’ébène ne pouvait se vanter d’un semblant d’ordre et la chemise opaline qu’il avait enfilée la veille était entièrement ouverte sur ses courbures anatomiques. Sur son torse et cette même chemise, d’importantes macules de sang qui témoignaient de la monstruosité de sa nuit. Non loin de lui, gisait encore le cadavre de son amante d’un soir, dépourvu de son organe cardiaque comme la signature du vampire. Celui-ci trônait dans la main du meurtrier, sa vigueur effacée, il n’était plus devenu qu’un détail aux yeux du gourmand qui ne faisait qu’apprécier sa surface entre ses doigts.

Il le délaissa sur les draps de son alcôve et s’aventura dans l’axe principal auquel se reliaient les chambres de ses congénères au sang pur. Sans réelle conviction, il le traversa d’un pas nonchalant pour prendre la direction du salon. Pris dans son élan, Lestat pénétra la pièce de réunion familiale sans hésitation, cependant… La surprise fut de taille. Soudain aveuglé par une lueur bien trop puissante pour ses pupilles à présent dilatées, il fut accablé par le chatoiement diurne au point de ne pas comprendre immédiatement la situation. C’est alors qu’une insoutenable douleur le saisit, d’effroyables brûlures naquirent sur son enveloppe charnelle et se dissipaient déjà dans une fine brume. Ses iris prirent instantanément une teinte écarlate vive et un grognement rauque se fraya un chemin hors de son gosier surmonté de ses longs crocs. Dans un mal absolu, ses muscles se contractèrent et toutes ses forces s’échappaient progressivement, s’il ne réagissait pas rapidement il ne resterait de lui qu’un vulgaire tas de poussière. L’incube fit un incroyable bond jusqu’à l’autre bout de la pièce, là où la pénombre régnait encore, où seuls ses yeux rutilants étaient visibles.

« Raccroches ces rideaux tout de suite !! »

tonna t-il d’une voix caverneuse et étonnement vigoureuse, avant de reprendre entre deux halètements.

« Pauvre idiote… »

Appuyé contre le mur le plus éloigné possible de la source de lumière, Lestat tentait de reprendre son souffle et surtout de se remettre des blessures causées par tant de clarté, poussant parfois d’effrayants feulements. Voilà qu’il venait de passer prés de la mort dans une des pièces les plus sécurisées de la demeure. La cécité temporaire causée par le soleil l’avait empêché d’identifier la responsable avec exactitude, mais qui qu’elle soit, elle allait devoir répondre de ses actes dès lors que le directeur serait remis de son expérience…

Elrisa avait à peine entamé sa descente, qu’un grognement rauque la fit sursauter. Le lourd tissu du rideau lui glissa des doigts, mais elle parvient à rattraper le rideau. Le cœur de la jeune femme battait à la chamade. Qui pouvait bien être entré dans le salon des Bathory? Seuls ces derniers et les domestiques avaient le droit d’entrée dans cette aile du manoir. Le sang de Risa se glaça dans ses veines… seul un vampire avait pu pousser un tel grognement. Que devait-elle faire? Elle ne voulait pas aggraver son cas, avec les vampires on ne savait jamais quelle serait leurs réactions. Leurs âges influençaient grandement leurs comportements. Ignorant qui était entré dans le salon, elle ne pouvait donc pas juger du danger qu’elle courrait. Soudain, une voix caverneuse lui ordonna de raccrocher les rideaux. Tremblante, mais encore calme, l’infant s’empressa d’obéir et parvient, avec peine et misère, à raccrocher le rideau. Rétablissant ainsi la pénombre bénie dans le salon.

Avec lenteur, Elrisa descendit de l’escabeau et le rangea dans un coin. Elle faisait tout cela en s’appliquant plus que nécessaire. Retardant le plus longtemps possible l’affrontement inévitable entre le vampire et elle. Que devait-elle faire? Elle avait passé proche de tuer quelqu’un! Certes, ce n’était nullement volontaire, elle ne pouvait pas savoir que quelqu’un allait entrer dans le salon pendant qu’elle s’y trouvait pour faire le ménage! Cependant, cela ne changeait rien au fait qu’elle avait passé proche de tuer quelqu’un! Le remord la rongeait, comment allait réagir le vampire? Là était la principale question qui lui tournait dans la tête.

Lentement, la domestique se tourna et regarda la pièce, cherchant à voir où était le rescapé et ne parvient à le repérer que grâce à ses effrayants feulements. Risa ne le regarda pas, se disant qu’il le prendrait sûrement comme une insulte après ce qu’elle avait fait et garda les yeux baisés. Cependant, la curiosité la rongeait… ah la curiosité! Quel vilain défaut qui poussait les gens à s’intéresser à ce qui ne les regardait pas ou bien qui les poussait à faire des choses qu’ils finiraient par regretter. Ce fût poussé par une curiosité, quelque peu morbide, que la jeune femme releva le regard, mais le spectacle qui s’offrit à elle l’effraya presque autant que ce qui l’attendait. La vue de cet homme gravement brulé la fit reculer de plusieurs pas. Elle sentit une table en bois s’enfoncer dans son dos, puis avant qu’elle puisse faire quoi que ce soit, un vase en porcelaine chancela et finit par tomber sur le sol. Cette nouvelle bévue ébranla le calme déjà rudement malmené d’Elrisa. Ce vase avait-il une grande valeur? Qu’allait-il advenir d’elle, maintenant? Sa position au sein de la famille Bathory n’était pas ce qu’il y avait de plus solide.

Tremblante, la jeune métisse s’accroupit et entreprit de ramasser les fragments du vase. Malgré ses tremblements elle parvient à ne pas se couper. Une fois tous les morceaux ramassés, elle se leva et alla les jeter dans la poubelle. La jeune femme due rassembler tout son courage, qui la fuyait plus le temps passait, et se tourna vers le vampire. Maintenant que la pénombre était revenue, sa récupération devait être achevée ou presque. Sentant ses mains trembler, Risa les serra l’une contre l’autre et parvient à contrôler leurs tremblements. Fermant les yeux, elle s’efforça de contrôler sa respiration pour tenter de se calmer et d’oublier sa peur de plus en plus grande. Peur qui était en grande partie dût à cause de l’inconnu de ce qu’il l’attendait. L’ignorance était la pire des tortures qui pouvait exister. Le corps était capable de s’adapter à bien des conditions de vie, mais l’esprit humain avait la fâcheuse tendance de s’emballer et d’imaginer plein de situations possibles… ce qui le torturait par le même coup. En cet instant, Elrisa maudissait sa partie humaine qui s’emballait et imaginait les pires scénarios possibles.

Quel ineffable soulagement de recouvrir une pénombre la plus totale. Malhabile, la fautive s’empressa cependant de remettre les lourds rideaux à leur place initiale sous la pression vocale qui l’y avait conviée. Le salon familial, un endroit bien inapproprié pour devenir sépulcral, une fin tout aussi absurde qu’indigne pour la notoriété de ce membre de l’illustre famille de la demeure. Défunt vampire réduit à son état originel par le plus renégat des antagonistes, celui qui constituait la faucheuse flamboyante de leur race. Cette menace céleste était contrée par l’herméticité des draperies de velours, permettant sûreté aux êtres cabalistiques qui vivaient en ces murs. L’incube était intérieurement consterné de constater que même dans sa propre demeure, il se devait d’être aussi vigilant qu’à l’extérieur, il n’y était même plus en sécurité… Contingente situation qui aurait pu se solder par un drame, les séquelles sur son épiderme meurtris lui rappelaient la précarité de son espèce face à ce détracteur diurne. Esseulé dans un coin de la pièce, les feulements du quidam blessé résonnaient sur les parois comme le synopsis d’une colère noire. Dans son éphémère torpeur, il distingua la silhouette de la responsable s’approcher, puis reculer aussi vite face à l’authentification des dégâts occasionnés. Cette vague de frayeur entraîna sa maladresse à s’attiser, et comme si sa tentative d’homicide involontaire ne suffisait pas à sa peine, son échine heurta un meuble sur lequel trônait une jarre ancestrale. L’amphore chancela, puis s’écrasa sur le sol en un assourdissant fracas. Le vacarme engendré sortit Lestat de sa langueur, celui-ci s’aida du mur à son épine dorsale pour se redresser bien qu’il demeura courbé en avant. Ses prunelles intensément écarlates se plantèrent sur la frêle structure féminine qu’il sentait frémir d’appréhension sur sa sanction à venir. Une lueur menaçante brûla dans son regard alors que le processus de régénération reconstruisait lentement sa peau, il ne put alors contrôler une impulsion caractérielle qui se répercuta dans le boudoir. Les miroirs et les fenêtres se fissurèrent en toute leur hauteur sous la pression mystique, l’une des croisées explosa en mille éclats de cristal qui s’éparpillèrent sur le sol, puis, la tension s’atténua…

Le démon prit une grande inspiration dans le but de recouvrir sa placidité, à présent totalement pansé de ses plaies. Son physique d’adonis retrouvé, il n’en demeurait pas plus vrai que la violence de cette éblouissante rencontre l’accablait d’une certaine faiblesse, cependant… Il lui restait une large réserve de ressources pour le châtiment qu’il établirait. Il se redressa de toute sa taille, les iris redevenus telles deux chrysolithes, et lorgna la domestique éloignée. Il aurait été apte à reconnaître ce lépidoptère thoracique parmi tant d’autres, cette fantaisie d’encre qu’il ne jugeait de loin pas sans charme, lui qui appréciait ces ornements anatomiques pour en avoir sur son propre corps. Elrisa Shang, une jeune soviétique au service de sa famille depuis peu de temps, et avec laquelle il avait promptement fait connaissance en lui démontrant ses lubies les plus infâmes. Ces magnifiques courbures qu’il avait possédées à quelques reprises et qui ne resteraient pas intactes de son divertissement. Il fit alors mine de réajuster sa chemise maculée, laissant le tatouage de son épaule à son pectoral apparaître de moitié. A pas lents, il avala la distance qui le séparait de la demoiselle, sans jamais la quitter du regard, la dévisageant sans retenue aucune. Il ne s’arrêta que lorsqu’il fut très proche d’elle, presque agglutiné à la jeune femme, laquelle aurait l’opportunité d’humer les fragrances sanguines du dernier meurtre du directeur dont il ne s’était pas encore débarrassées. Un silence s’écoula, son expression physionomique avait recouvert son flegme habituel, et sa voix rauque fut tout aussi imperturbable nonobstant les récents évènements.

« Elrisa … »

Prononça t-il mielleusement.

« Chercherais-tu à occire ton maître ou menais-tu une expérimentation personnelle sur les conditions vampiriques de tes supérieurs que tu ne possèdes pas ?… »

Il s’appuya sur la table de manière à l’emprisonner contre lui, puis se pencha sensuellement vers son visage.

« Je me vois terriblement contrarié par tant d’ingratitude et d’impudence… »

Bien entendu, Lestat se doutait des causes ménagères qui avaient obligé la russe à destituer les rideaux de leurs fonctions, il ne voyait ici qu’une occasion de plus à un délassement dont il ne se priverait pas, pour le plus grand malheur de la fragile domestique. Il était cohérent d’affirmer que cette dernière était au mauvais endroit au mauvais moment, il était rare que le vampire souffre de paresse matinale, mais aujourd’hui était une exception à la règle. Sa main gauche grimpa jusqu’à saisir la joue d’Elrisa, ses lèvres déposèrent un chaste baiser sur son front avant que ses doigts ne s’octroient un avalage bien moins pur. Ils glissèrent le long de sa carotide, ébauchèrent les cambrures de son buste et s’invitèrent à la rencontre du papillon mammaire. Il effleura sans vergogne cette parcelle d’intimité tout en s’ajustant prés de son oreille pour pouvoir lui susurrer quelques tendres mots. Avant qu’il ne reprenne la parole, les huis se fermèrent à clés alternativement, victimes de la force d’esprit du démon.

« Je doute que tu veuilles savoir ce qu’il se passe lorsque l’on me contrarie… »

Il émit un ricanement aux frémissements de la jeune femme.

« Tu trembles… As-tu peur… ? »

La pression invisible qui envahit la pièce, au point de faire fissurer fenêtres et miroir, voire même de faire éclater une croisée en mille morceaux, ne surprit nullement la jeune femme. Il fallait dire qu’elle s’était attendue à pire comme réaction, car rare était les vampires à rester sans réagir ou presque, alors qu’ils venaient de frôler la mort de justesse. Pendant tout le temps où elle nettoya les restes du défunt vase, elle avait senti son regard peser sur elle. Pourquoi le vampire la regardait-il avec tant d’insistance? Peut-être se demandait-il quelle était la meilleure manière de se venger d’elle? De retour à sa place, Elrisa regarda les morceaux qui jonchaient le sol. Que faire? Devait-elle les ramasser? Cependant… elle n’avait pas de balais et avec tous ses morceaux elle risquait de se couper, ce qui ne ferait que donner faim au vampire et dans sa situation, mieux valait éviter cela.

Lorsqu’elle vit le vampire se redresser de toute sa taille, Risa comprit aussitôt. Il avait fini de récupérer. Elle n’allait pas tarder à connaître sa sentence. Elle déglutit péniblement, tente d’imaginer ce qu’elle allait devoir subir comme pénitence. La jeune domestique aurait immédiatement reconnu le vampire si elle avait croisé son regard, mais comme elle gardait les yeux baissés, l’infant resta dans l’ignorance ce qui n’était pas si pire… ou peut-être aurait-elle mieux fait de savoir qui allait être son bourreau, comme cela elle aurait su à quoi s’attendre. En entendant les pas du vampire s’approcher pour franchir la distance qui les séparait, elle releva la tête et le reconnut tout de suite en voyant le tatouage qui se situait sur l’épaule et le pectoral du vampire.

Décidément, ce n’était pas sa journée! Il avait fallu qu’elle passe proche d’assassiner son employeur! Que devait-elle faire? Elle se rappelait très bien la manière dont ils avaient fait connaissance. Puis qu’il était son employeur, elle ne pouvait pas se permettre de se le mettre à dos et s’était efforcée à endurer tout ce qu’il lui faisait. Cependant, elle n’était pas sûre de pouvoir rester calme après s’être mis dans un tel pétrin. La jeune soviétique frémit légèrement lorsqu’il s’arrêta, alors qu’uniquement quelques centimètres ne les séparaient. Inconsciemment, sa respiration s’accéléra et elle sentit sur Lestat l’odeur de sa dernière proie et selon l’odeur du sang qu’il avait sur lui… cette dernière devait être morte. Serrant ses mains, pour les empêcher de monter toucher son cou, elle écouta l’adonis lui parler et lui dire qu’il était contrarié. Le temps qu’elle cherche de quoi lui répondre, il était parvenu à l’emprisonner entre lui et la table… il était parvenu à l’empêcher de fuir avant même qu’elle n’y pense.

"N… non monsieur! Ja… jamais je ne chercherais à vous… tuer! De plus, je n’ai pas l’âme d’une scientifique, monsieur. "Dit-elle, la voix légèrement tremblante avant de baisser le regarde.

Elrisa se tendit en sentant la main gauche de Lestat venir se poser sur sa joue. Elle garda les yeux baissés, sûre que si elle croisait son regard et voyait ses intentions à son égard, qu’elle perdrait le peu de calme qui lui restait. Elle ferma les yeux et attendit que le coup vienne. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’il l’embrassa chastement sur le front. Elrisa ouvrit de grands yeux et leva légèrement le regard pour l’observer. L’infant ne se rendit pas compte que la main de son employeur avait de nouveau bougé. Elle sursauté légèrement en sentant les doigts du vampire s’aventurer au commencement de sa poitrine, là où se situait son tatouage de papillon. Voulant échapper à cette caresse, Risa voulut reculer à nouveau, mais la table l’en empêcha. S’efforçant de rester calme, la jeune domestique l’écouta lui dire qu’elle ne voulait pas savoir ce qui arrivait lorsqu’on le contrariait, puis lui demander si elle tremblait. La jeune femme n’avait nullement besoin de savoir ce qui arrivait lorsqu’il était contrarié…ou du moins, presque… elle se souvenait très bien de leur dernière rencontre. Son corps en gardait encore des traces. Un nouveau tremblement s’empara d’elle, mais elle ne parvient pas à le contrôler.

"Non… monsieur… je ne tremble pas de peur… " parvient-elle a dire et tournant la tête du bord droit, lui facilitant l’accès à son cou, bien que ce soit involontairement.

Sentant ses jambes qui menaçaient de ne plus la soutenir, la jeune soviétique utilisa la table derrière elle pour se soutenir. Elle avait dit la vérité à son employeur, ce n’était pas de peur qu’elle tremblait, mais bien d’appréhension. Malgré tout, elle ne faisait aucun geste pour se soustraire à ses caresses, ce disait qu’il finirait bien par la laisser tranquille.

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Journée de ménage [Pv Lestat]

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